Préface des Éditions de Londres
« Crime et Châtiment » est l’une des œuvres les plus connues de Fiodor Dostoïevski. Elle fut écrite en 1866 où elle parut en feuilleton tout au long de l’année. Puis une édition complète légèrement remaniée parut en 1867.
Elle reçut, dès sa parution, un accueil très favorable des lecteurs.
Le sujet
« Crime et châtiment » raconte l’histoire d’un étudiant pauvre de Saint-Pétersbourg qui décide de tuer une vieille usurière pour lui prendre son argent. Il prend cette décision, sous l’influence des idées nouvelles, mal digérées, pensant que l’argent de la vieille lui permettra de terminer ses études et de pouvoir ainsi être utile à la société et que le bien qui en résultera justifie l’horreur de l’assassinat.
Dostoïevski y décrit donc les hésitations du jeune homme puis, après que le crime ait été exécuté, les remords qui le rendent malade et presque fou.
L’étudiant après un long suspense pendant lequel il ne sait pas si la police a ou non découvert son crime sera conduit psychologiquement à se dénoncer. La déportation en Sibérie permettra sa rédemption.
La version des Éditions de Londres
La version que nous proposons reprend la traduction de Victor Derély parue chez Plon dès 1884.
Nous y avons réintroduit certains passages qui avaient été ignorés par le traducteur.
Nous en avons corrigé les mots et les tournures obsolètes pour en permettre une lecture plus confortable.
Résumé du livre
Le livre est constitué de plusieurs intrigues qui s’imbriquent entre elles.
L’intrigue principale est le crime que commet Raskolnikov en tuant une vieille usurière. Raskolnikov est un étudiant très pauvre de Saint-Pétersbourg qui vient d’abandonner ses études faute d’argent. Il a imaginé, en méditant longuement, qu’il pouvait tuer l’usurière et lui prendre son argent afin de pouvoir continuer ses études.
Au début, on assiste à ses hésitations, mais une rencontre fortuite le décide à agir. Il commet son crime et doit aussi tuer la sœur de l’usurière charitable et serviable qui arrive alors qu’il est dans l’appartement.
Malgré beaucoup d’approximations et de difficultés dans la réalisation du crime, il parvient à rentrer chez lui sans laisser de traces tangibles.
Constatant l’atrocité de son geste, il tombe malade et plus ou moins fou. Il est persuadé que la police sait que c’est lui le coupable et cherche à le pousser à commettre une erreur. Il veut cacher les preuves et pense à jeter le butin dans la rivière, finalement il le cache sous une pierre dans un endroit isolé sans en rien garder.
Il apprend par son ami Razoumikhine qu’un peintre est accusé du crime, mais selon Razoumikhine, il n’est pas possible psychologiquement que ce soit le peintre.
Il erre, plus ou moins conscient, dans Saint-Pétersbourg. Il rencontre dans une taverne le secrétaire du commissariat et met la conversion sur le crime de l’usurière. En sortant de la taverne, il se retrouve machinalement devant la maison de l’usurière et va visiter l’appartement du crime qui est en travaux. Il tient des propos incohérents aux ouvriers et au portier.
La tension est de plus en plus forte pour lui. Incapable d’attendre, il va de lui-même rencontrer le juge d’instruction chargé de l’affaire, accompagné par son ami Razoumikhine, qui connaît personnellement ce juge, sous prétexte de savoir ce qu’est devenu un gage qu’il avait laissé à l’usurière. Après une première rencontre, le juge le convoque à nouveau et l’on pense qu’il va être inculpé, mais le peintre, initialement soupçonné vient s’accuser du crime.
Raskolnikov ne supporte plus la situation. Il pense à se tuer, mais il n’en a pas le courage et va finalement se dénoncer. Il sera condamné à huit ans de travaux forcés en Sibérie. Il se trouvera alors régénéré par la punition.
La seconde intrigue concerne les relations de Raskolnikov avec un ancien fonctionnaire ivrogne : Marméladov et sa famille. Il le rencontre d’abord dans une taverne. Marméladov lui parle de sa famille et de la misère qu’il lui fait subir. Il ne travaille pas et dépense tout l’argent du ménage pour boire. Sa femme est phtisique. Sa fille aînée, Sonia, bien que très douce et très pieuse, doit se prostituer pour procurer de la nourriture à ses frère et sœurs.
Par la suite, Marméladov est renversé par un cheval. Raskolnikov, qui passait là, le porte chez lui et le veille jusqu’à sa mort. En partant, il laisse tout l’argent qu’il avait reçu de sa mère ce jour-là, pour payer les obsèques.
Sonia vient le lendemain le convier aux obsèques, il se sent très touché par la jeune fille. Il ira la retrouver plus tard et lui expliquera qu’ils sont pareils et il lui demandera de partir avec lui.
Le repas d’obsèques se passe très mal. La logeuse veut mettre la femme de Marméladov à la rue. Celle-ci s’en va chanter dans les rues avec ses enfants. Elle devient folle et meurt peu après.
Après sa deuxième rencontre avec le juge, Raskolnikov retournera voir Sonia et lui avouera son crime. Pour la jeune fille, l’acte est monstrueux, mais sa réaction n’est pas de le rejeter, mais de partager sa douleur et de le suivre aux galères. Elle veut qu’il aille se dénoncer, qu’il accepte l’expiation pour se racheter.
Après la condamnation, elle le suit en Sibérie pour lui rendre régulièrement visite au bagne.
La troisième intrigue concerne les relations de Raskolnikov avec sa sœur et sa mère. Elle commence par la réception d’une lettre de sa mère lui annonçant le mariage prochain de sa sœur, Dounia, avec un homme plus âgé. Raskolnikov ne veut pas de ce mariage, convaincu que sa sœur se sacrifie pour avoir de l’argent pour l’aider. En même temps, sa mère annonce leur visite prochaine à Saint-Pétersbourg où doit avoir lieu le mariage.
Le futur mari, Loujine, rend visite à Raskolnikov et celui-ci lui annonce qu’il ne veut pas du mariage, l’injurie et le jette dehors.
La mère et la sœur, arrivées à Saint-Pétersbourg, l’attendent chez lui un soir où il a erré dans Saint-Pétersbourg. Honteux de son crime, il ne veut d’abord pas les voir et il faut que son ami Razoumikhine intercède entre eux pour qu’il arrive à leur parler. Razoumikhine tombe amoureux de Dounia.
Loujine repousse les rendez-vous pour rencontrer Dounia et sa mère, car il est trop occupé. Il leur écrit pour leur fixer rendez-vous chez elles en demandant instamment que Raskolnikov ne soit pas présent.
Dounia n’accepte pas que l’on repousse ainsi son frère et lui demande de venir à cette rencontre. L’entrevue se passe très mal et finalement Dounia congédie Loujine en lui indiquant qu’elle ne veut plus jamais le revoir.
Razoumikhine déclare sa flamme à Dounia et va l’épouser.
La quatrième intrigue concerne Svidrigaïlov, personnage assez mystérieux, chez qui Dounia a été institutrice. Elle avait dû quitter son poste à cause des avances de son patron.
Svidrigaïlov rend visite à Raskolnikov en lui annonçant que sa femme est morte et qu’il veut épouser la sœur de Raskolnikov dont il est toujours amoureux. Il annonce en même temps que Dounia va hériter d’une belle somme léguée par sa femme.
Un jour, Svidrigaïlov annonce à Raskolnikov qu’il est au courant de son crime, car il l’a entendu faire ses aveux à Sonia. Cela augmente encore la tension qui pèse sur Raskolnikov qui ne sait pas si Svidrigaïlov veut l’aider à échapper à la police ou s’il va le dénoncer.
Svidrigaïlov, toujours amoureux de Dounia, va à sa rencontre et la ramène chez lui pour lui parler. Il lui renouvelle sa proposition, mais devant le refus de Dounia, il s’apprête à la violer. Dounia sort une arme, mais n’arrive pas à l’atteindre. Svidrigaïlov, furieux et honteux, la laisse partir.
Le lendemain après une nuit agitée de cauchemars, il va se tuer d’une balle en pleine rue.
Les personnages
Les principaux personnages du roman sont :
Rodion Romanovitch Raskolnikov aussi appelé Rodia, Rodienka, Rodka. : C’est le personnage principal qui commet le crime. Étudiant pauvre, il ne va plus à l’université faute d’argent.
Aléna Ivanovna : C’est l’usurière que tue Raskolnikov.
Élisabeth Ivanovna : La sœur de l’usurière. Elle est serviable et douce, tyrannisée par sa sœur.
Prascovie Pavlovna Zarnitzine : C’est la logeuse de Raskolnikov qui n’étant pas payée ne le nourrit plus et veut porter plainte à la police.
Nastasia ou Nastasiouchka : c’est la servante de la logeuse, un peu la confidente de Raskolnikov. Elle lui sert de la soupe en cachette et veut essayer de le faire sortir de sa torpeur.
Semione Zacharovitch Marméladov : c’est un ancien fonctionnaire, ivrogne qui rend sa famille miséreuse à cause de la boisson.
Catherine Ivanovna : la femme de Marméladov, phtisique et malheureuse. Elle regrette sa jeunesse aisée.
Sophie Séménovna aussi appelée Sonia, Snetchka : c’est la fille aînée de Marméladov. Elle est très douce et très serviable, mais elle a dû se prostituer pour nourrir ses frère et sœurs.
Pulchérie Alexandrovna Raskolnikov : la mère de Raskolnikov. Issue d’une bonne famille, mais très désargentée.
Edvokia Romanovna aussi appelée Dounia, Dounetchka : la sœur de Raskolnikov, jeune fille forte et courageuse. Elle adore son frère et est prête à se sacrifier pour lui.
Arkadi Ivanovitch Svidrigaïlov : Un personnage bizarre, joueur invétéré, retiré à la campagne où il vit aux dépens de sa femme Marfa Petrovna.
Pierre Petrovitch Loujine : il doit épouser Dounia. Il est prétentieux et indélicat.
Dmitri Prokofitch Razoumikhine : C’est l’ami de Raskolnikov, débrouillard et pragmatique, toujours prêt à rendre service.
Zosimov : le médecin qui soigne Raskolnikov.
Porphyre Pétrovitch : le juge d’instruction chargé de l’enquête sur le crime.
Nikodim Fomitch : commissaire du quartier.
Ilia Pétrovitch dit La Poudre : lieutenant de police.
Alexandre Grigorievitch Zamétov : Le secrétaire du bureau de police.
Quelques extraits clés
Crime et Châtiment n’est pas un roman à thèse. Dostoïevski y décrit la vie des Russes de son époque et y présente un certain nombre d’idées qui agitent la société de l’époque.
Dans le chapitre 6 de la deuxième partie, les deux officiers que Raskolnikov entend expliquent les motivations intellectuelles qui ont poussé Raskolnikov à tuer l’usurière :
« D’un côté, une vieille femme maladive, bête, stupide, méchante, un être qui n’est utile à personne et qui, au contraire, nuit à tout le monde, qui ne sait pas lui-même pourquoi il vit, et qui mourra demain de sa mort naturelle. De l’autre côté, des forces jeunes, fraîches, qui s’étiolent, se perdent faute de soutien, et cela par milliers, et cela partout ! Des centaines d’existences, des milliers peut-être mises dans le bon chemin, des dizaines de familles sauvées de la misère, de la dissolution, de la ruine, du vice, et tout cela avec l’argent de cette femme ! Qu’on la tue et qu’on fasse ensuite servir sa fortune au bien de l’humanité, crois-tu que le crime, si crime il y a, ne sera pas largement compensé par des milliers de bonnes actions ? Mais, voyons, c’est une question d’arithmétique ! Et que pèse dans les balances sociales la vie d’une vieille femme cacochyme, bête et méchante ? Pas plus que la vie d’un pou ou d’une blatte ; je dirai même moins, car cette vieille est une créature malfaisante, un fléau pour ses semblables. »
Dans le chapitre 1 de la deuxième partie, Raskolnikov exprime sa croyance en un châtiment divin de son crime, alors qu’il n’arrive plus à contrôler ses actions, en s’écriant :
« Quoi ! est-ce que déjà le châtiment commencerait ? Voilà ! voilà ! en effet ! »
Dans le même chapitre, il exprime que le remord qu’il porte en lui suite à son crime en a fait un paria exclu de la société :
« Un phénomène tout nouveau, sans précédent jusqu’alors, s’accomplissait en lui. Il comprenait ou plutôt – chose cent fois pire – il sentait dans tout son être qu’il était désormais retranché de la communion humaine, que toute expansion sentimentale, bien plus, que toute conversation quelconque lui était interdite, non seulement avec ces gens du commissariat, mais avec ses parents les plus proches. Jamais encore il n’avait éprouvé une sensation aussi cruelle. »
Dans le chapitre 5 de la troisième partie, Razoumikhine présente les idées des socialistes contestataires sur le crime :
« Les socialistes ont commencé par exposer leur théorie. On sait en quoi elle consiste : le crime est une protestation contre un ordre social mal organisé – rien de plus. Quand ils ont dit cela, ils ont tout dit ; ils n’admettent pas d’autre cause des actes criminels ; pour eux, l’homme est poussé au crime par l’influence irrésistible du milieu et par elle seule. Ils prétendent qu’il n’y a pas d’autre cause ! Quand tout va mal, ils prétendent que c’est l’influence du milieu qui perd l’homme, selon leur expression préférée ! D’où il découle que si la société était normalement organisée, tous les crimes disparaîtraient, car ces réactions ne seraient plus nécessaires et tout le monde deviendrait immédiatement équitable. Ils ne tiennent pas compte de la nature, elle est annihilée, elle n’existe pas ! »
Dans le même chapitre, Raskolnikov présente la justification de son crime. Il avait le droit de tuer parce qu’il se pense un surhomme :
« Quant à ma division des gens en ordinaires et extraordinaires, je reconnais qu’elle est un peu arbitraire. Je crois seulement qu’au fond ma pensée est juste. Elle revient à dire que la nature partage les hommes en deux catégories : l’une inférieure, celle des hommes ordinaires, sortes de matériaux ayant pour seule mission de reproduire des êtres semblables à eux ; l’autre supérieure, comprenant les hommes qui possèdent le don ou le talent de faire entendre dans leur milieu un mot nouveau. À la première catégorie appartiennent d’une façon générale les conservateurs, les hommes d’ordre, qui vivent dans l’obéissance et qui l’aiment. À mon avis, ils sont même tenus d’obéir, parce que c’est leur destination et que cela n’a rien d’humiliant pour eux. Le second groupe se compose exclusivement d’hommes qui violent la loi ou tendent, suivant leurs moyens, à la violer. Leurs crimes sont, naturellement, relatifs et d’une gravité variable. La plupart réclament la destruction de ce qui est au nom de ce qui doit être. Mais si, pour leur idée, ils doivent verser le sang, passer par-dessus des cadavres, ils peuvent en conscience faire l’un et l‘autre, – dans l’intérêt de leur idée, du reste, – notez cela. D’ailleurs, il n’y a pas lieu de s’inquiéter beaucoup : presque jamais la masse ne leur concède ce droit, elle les décapite et les pend, et par là elle remplit très justement sa mission conservatrice jusqu’au jour, il est vrai, ou cette même masse érige des statues aux suppliciés et les vénère. Le premier groupe est toujours le maître du présent, le second groupe est le maître de l’avenir. L’un conserve le monde et en multiplie les habitants, l’autre meut le monde et le conduit au but. »
Au chapitre 6, Raskolnikov, dans son délire fiévreux ressent la pauvreté de la justification de son geste et constate qu’il n’a commis qu’un vil crime :
« La vieille ne signifie rien, se disait-il par accès : – mettons que la vieille soit une erreur, il ne s’agit pas d’elle ! La vieille n’a été qu’un accident… je voulais sauter le pas au plus tôt… Ce n’est pas une créature humaine que j’ai tuée, c’est un principe ! J’ai bien tué le principe, mais je n’ai pas su passer par-dessus, je suis resté en deçà… Je n’ai su que tuer ! Et encore n’y ai-je pas trop bien réussi, à ce qu’il paraît… »
Au chapitre 5 de la quatrième partie, Porphyre explique comment le remord conduira un homme intelligent à s’accuser du crime qu’il a commis :
« Si, au contraire, je laisse parfaitement tranquille le coupable présumé, si je ne le fais pas arrêter, si je ne l’inquiète pas, mais qu’à toute heure, à toute minute, il soit obsédé par la pensée que je sais tout, que je ne le perds de vue ni le jour ni la nuit, qu’il est de ma part l’objet d’une surveillance infatigable, – qu’arrivera-t-il dans ces conditions ? Infailliblement il sera pris de vertige, il viendra lui-même chez moi, il me fournira quantité d’armes contre lui et me mettra en mesure de donner aux conclusions de mon enquête un caractère d’évidence mathématique, ce qui ne manque pas de charme. »
Au chapitre 4 de la cinquième partie, Raskolnikov se confesse à Sonia en analysant ce qui l’a conduit au crime, il voulait se prouver qu’il était un homme supérieur :
« Tais-toi, Sonia, je ne ris pas du tout ; je sais fort bien que le diable m’a entraîné. Je sais tout. Tout ce que tu pourrais me dire, je me le suis dit mille fois, pendant que j’étais couché dans les ténèbres… Que de luttes intérieures j’ai subies ! Que tous ces rêves m’étaient insupportables et que j’aurais voulu m’en débarrasser à jamais ! Crois-tu que je sois allé là comme un étourdi, comme un écervelé ? Loin de là, je n’ai agi qu’après mûres réflexions, et c’est ce qui m’a perdu ! Penses-tu que je me sois fait illusion ? Quand je m’interrogeais sur le point de savoir si j’avais droit à la puissance, je sentais parfaitement que mon droit était nul par cela même que je le mettais en question. Lorsque je me demandais si une créature humaine était une vermine, je me rendais très bien compte qu’elle n’en était pas une pour moi, mais pour l’audacieux qui ne se serait pas demandé cela, et aurait suivi son chemin sans se tourmenter l’esprit à ce sujet… Enfin le seul fait de me poser ce problème : « Napoléon aurait-il tué cette vieille ? » suffisait pour me prouver que je n’étais pas un Napoléon… Finalement j’ai renoncé à chercher des justifications subtiles : j’ai voulu tuer sans état d’âme, tuer pour moi, pour moi seul ! Même dans une pareille affaire j’ai dédaigné de ruser avec ma conscience. Si j’ai tué, ce n’est ni pour soulager l’infortune de ma mère, ni pour consacrer au bien de l’humanité la puissance et la richesse que, dans ma pensée, ce meurtre devait m’aider à conquérir. Non, non, tout cela était loin de mon esprit. Dans ce moment-là, sans doute, je ne m’inquiétais pas du tout de savoir si je ferais jamais du bien à quelqu’un ou si je serais toute ma vie un parasite social !… Et l’argent n’a pas été pour moi le principal mobile de l’assassinat, une autre raison m’y a surtout déterminé… Je vois cela maintenant… Comprends-moi : si c’était à refaire, peut-être ne recommencerais-je pas. Mais alors il me tardait de savoir si j’étais une vermine comme les autres ou un homme dans la vraie acception du mot, si j’avais ou non en moi la force de franchir l’obstacle, si j’étais une créature tremblante ou si j’avais le droit de tuer. »
« Mais, voyons, comment ai-je tué ? Est-ce ainsi qu’on tue ? S’y prend-on comme je m’y suis pris, quand on va assassiner quelqu’un ? Je te raconterai un jour les détails… Est-ce que j’ai tué la vieille ? Non, c’est moi que j’ai tué, que j’ai perdu sans retour !… Quant à la vieille, elle a été tuée par le diable, et non par moi… »